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Ce samedi 12 décembre 2020, nous nous rendons à Bois-Grenier, à 20 km de La Madeleine, en compagnie de Céline, Présidente de l’AMAP de La Madeleine (Association pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne). Nous allons retrouver Laurent, agriculteur en bio, sur son exploitation, la Ferme de l’Aubépine. C’est le fournisseur des paniers de légumes de l’AMAP de La Madeleine. Une fois n’est pas coutume, nous nous livrons à une interview croisée.

Bonjour Laurent, bonjour Céline, pouvez-vous nous expliquer ce qu’est une AMAP, et comment fonctionne celle de La Madeleine ?

Céline : Une AMAP c’est une association pour le maintien d’une agriculture paysanne. C’est un mode de consommation alimentaire collaboratif, qui est né dans les années 70/80 au Japon et aux Etats Unis. La vocation première est de soutenir financièrement un maraîcher. L’idée, c’est de payer en avance un agriculteur maraîcher, afin de l’aider à consolider sa situation financière. En échange, l’agriculteur livre chaque semaine un panier de légume à l’adhérent consommateur, l’amapien. Ce panier de légumes doit provenir d’une production de saison et de sa ferme. Être amapien c’est donc un vrai engagement financier pour soutenir un maraîcher. C’est la grande différence avec la livraison de légumes « classique ». Je le précise, car souvent les gens confondent AMAP, et livraison de légumes via divers circuits.

Laurent : C’est gagnant-gagnant ! Mais, il n’y a pas que l’aspect financier. Pour les consommateurs, l’idée est de consommer en fonction des saisons, et de connaître la provenance de leurs produits. Il s’agit d’avoir des légumes les plus frais possible, mais également de créer des liens avec le producteur, qui ne soient pas que financiers.

J’avais un peu de mal à croire que les gens allaient payer, à l’avance, pour un produit qu’ils n’avaient pas vu

Avec Céline, si on a développé ce lien d’amitié, ce n’est pas anodin. Ce n’est pas forcément le cas dans les autres modèles de distribution de livraison de paniers, pour lesquels il n’y a pas forcément ce lien avec le producteur. A l’AMAP de La Madeleine, on échange lors des moments de distribution, on échange lors des journées chantiers organisés à la ferme et pendant l’assemblée générale.

J’avoue qu’au tout début j’avais un peu de mal à croire que les gens allaient payer, à l’avance, pour un produit qu’ils n’avaient pas vu ! Ils payent un montant fixe et déterminé à l’avance, sans connaître exactement la quantité qu’ils vont recevoir.

Et donc les débuts… Comment vous êtes-vous trouvés ? Comment tout cela a démarré ?

Laurent : C’était sur meetic non ? (rires). Dans le milieu agricole, on parlait beaucoup du système des AMAP. Moi, je n’y croyais pas trop, comme je viens de vous le dire. Il y a un copain, Kevin Charnay, fondateur de l’AMAP de la Pévèle, qui a initié le mouvement. Je suis allé voir comment ça se passait, je n’y ai vu que du positif, pour lui et les consommateurs. Je me suis inscrit sur un réseau qui essaye de rapprocher les consommateurs des producteurs. Il y a eu une première approche de Perrine, l’ancienne présidente, et on a fait une visite de la ferme. Ça s’est plutôt bien passé, et on a commencé avec une dizaine d’amapiens. Aujourd’hui on est une quarantaine, sur deux AMAP, à La Madeleine et Marcq-en-Baroeul.

Céline :  Au début Laurent n’était pas très chaud pour se lancer dans l’AMAP, et maintenant quand il en parle il dit « mes amapiens » … (rires) Il y a un vrai lien qui s’est créé !

Cela m’oblige à redécouvrir des légumes et à développer une forme de créativité pour cuisiner.

Laurent : C’est vrai, je les ai adoptés ! (rires) Il y a des gens avec lesquels le courant passe bien, car ils sont aussi en demande d’autre chose que simplement consommer des fruits et légumes. Avec d’autres, c’est plus bonjour, au revoir et merci…  Il faut dire qu’il y a beaucoup de turn-over aussi, donc ce n’est pas évident de consolider les liens. Heureusement Céline est là pour stabiliser, elle reste fidèle ! Pourtant depuis le temps, elle pourrait très bien trouver des bons légumes ailleurs.

Céline : Justement ! Ce qui me fait rester c’est la contrainte ! Avec ce système je n’ai pas le choix et ça m’arrange ! Ça m’oblige à redécouvrir des légumes et à développer une forme de créativité pour cuisiner.

Si j’ai bien compris il y a donc un réseau qui met en relation les producteurs et les AMAPs ?

Laurent : Oui, via le réseau Régional des AMAPs qui met en relation. Il y a une charte et un cahier des charges pour pouvoir y adhérer. Ce n’est pas une marque à proprement parler, mais c’est une forme de label déposé. Il y a des obligations. Normalement l’agriculteur écoule toute sa production dans l’AMAP.

Comme le modèle est un peu contraignant, il n’y a pas non plus tant de consommateurs intéressés

Pour ma part, j’ai d’autres débouchés, en magasin ou en circuit de gros. Ça m’a valu quelques attaques de la part d’autres agriculteurs, qui estimaient que je ne faisais pas vraiment de l’AMAP. On galère déjà assez dans nos métiers, si on en plus on se tire dans les pattes… Le problème du modèle « 100% des débouchés dans l’AMAP », c’est que ça peut devenir compliqué quand il n’y a pas suffisamment d’amapiens. Ça dépend de la taille de l’exploitation, donc ce n’est pas évident non plus…

De plus, comme le modèle de consommation est un peu contraignant, il n’y a pas non plus tant de monde que cela qui est intéressé ou qui pérennise son engagement. Il y a beaucoup de monde qui dit « c’est super ce que vous faites » … Mais une fois que vous avez, trois semaines d’affilée, des topinambours dans votre panier, c’est plutôt « ras le bol ! Je vais plutôt me réorienter vers un système de paniers ou la vente par internet, qui est plus souple ».

Qu’est-ce qui vous a poussés, l’un en tant que producteur, et l’autre en tant que consommateur, à vous orienter vers ce type d’échange ?

Laurent : Il fallait déjà, tout simplement, que je trouve des débouchés pour écouler mes produits. Comme on est en maraîchage, on ne choisit pas tout à fait la façon dont se déroule la récolte : certaines années, je peux me retrouver avec très peu de carottes, et énormément de navets ! Donc, ce système de vente me permet de limiter la casse sur les volumes à écouler en fonction des récoltes.

Sur les légumes délicats, c’est quand même rageant de songer à devoir broyer s’il n’y a pas la vente en face.

En vente directe, le producteur ne choisit pas ce que les consommateurs vont acheter, alors que dans ce système d’AMAP, ça me permet d’écouler la récolte. Si on reprend mon exemple, je pourrais donc mettre dans le panier un peu plus de navets que de carottes, car l’année aura été meilleure en navets. Ça évite les pertes, c’est très appréciable. Après, il faut être honnête et réglo : si ça arrive, l’année suivante, je rééquilibre !

Sur un produit comme la salade par exemple, les récoltes vont tomber toutes en même temps, à quinze jours d’intervalle. Le marché est alors saturé car les agriculteurs sont tous dans la même situation. Dans ces cas-là, je peux davantage remplir les paniers avec des salades sur cette période. Sur les légumes délicats, c’est quand même rageant de songer à devoir broyer s’il n’y a pas la vente en face.

Il faut aussi préciser qu’on est sur un modèle de vente directe, sans intermédiaire, donc ça permet d’avoir une valeur ajoutée supérieure. Ce qui est pratique aussi, c’est qu’en une heure, je peux vendre à 60 personnes, alors que sur un marché je devrai y passer la matinée pour avoir 50 clients. Parfois, sur le marché, tu peux même n’avoir aucun client, si c’est en été, et que tout le monde est en vacances ! Avec notre système, les amapiens s’organisent pour réguler tout au long de l’année !

Le système de l’AMAP me va bien, car je n’ai pas spécialement le temps de faire des courses.

Céline : J’ai longtemps travaillé dans l’avesnois, où je trouvais beaucoup de vente directe de fruits et légumes locaux, et je ne retrouvais pas cette formule à Lille. Je cherchais, autour de la métropole, de la vente directe à la ferme Vers 2010-2011, ce n’était pas énormément développé, donc c’était compliqué. J’ai fini par trouver l’AMAP par hasard.

J’étais dans cette recherche car j’adore manger des bonnes choses, je passe mon temps à faire la cuisine, et surtout des légumes. Le système de l’AMAP me va bien, car je n’ai pas spécialement le temps de faire des courses. J’ai une vie professionnelle dense, je n’ai pas l’opportunité de faire le marché le vendredi. Du coup, aller chercher mon panier le mercredi, entre 18h30 et 19h30, ce n’est plus vraiment une contrainte, c’est devenu une obligation qui m’arrange.

Je n’ai pas à passer du temps à choisir mes légumes, je sais que c’est Laurent qui va le faire ! Je me retrouve avec des fraises ou des topinambours en fonction des saisons, et je suis obligé de les cuisiner. Je trouve cela canon ! Finalement, ça m’évite de trop réfléchir et devoir m’organiser pour les achats alimentaires. Sinon, pour les autres amapiens, d’année en année, on a de plus en plus un intérêt pour la proximité de la livraison. On a de plus en plus d’amapiens qui habitent vraiment dans un périmètre proche de la place du marché (où se déroule la distribution).

Laurent : Il y a peut-être aussi ce côté surprise de ce qu’il y a dans le panier non ?

Céline : Oh, au bout de dix ans je connais à peu près la saisonnalité de ce que tu produis tu sais ! (Rires)

Laurent : C’est vrai qu’il faut dire que Céline est l’amapienne la plus fidèle ! Parce qu’en effet, avec ce rythme des saisons et des paniers je reconnais moi-même que les amapiens puissent tomber dans une forme de lassitude…

De manière générale, on n’est pas débordés par rapport à d’autres AMAPs où il y a une attente importante.

Céline : C’est vrai qu’on a beaucoup de turn-over, mais je ne suis pas sûr que ce soit de la lassitude. Si on compare avec d’autres AMAPs, notamment en milieu rural, notre turn-over est davantage élevé. Cependant, cela s’explique naturellement car en ville, et surtout à La Madeleine, on touche de jeunes parents, ou de manière générale des personnes entre 25 et 50 ans, qui sont davantage susceptibles de déménager.

D’ailleurs, comment cela fonctionne ? Il y a une liste d’attente ? Peut-on s’inscrire ?

Laurent : Jusqu’à présent il n’y avait pas vraiment de liste d’attente, parce que l’on n’est pas non plus débordés par les demandes ! Aujourd’hui on a une petite liste d’attente, car on lève un peu le pied en prévision de l’ouverture d’un magasin collectif de producteurs. J’ai peur de ne pas pouvoir suivre. De manière générale, on n’est pas débordés par rapport à d’autres AMAPs où il y a une attente importante.

Céline : Il y a deux raisons à cette volonté de ne pas croître : la première c’est que Laurent nous a prévenus qu’il ne pourrait pas aller au-delà de quarante paniers. Cela correspond à environ 45 à 50 amapiens, car on fait aussi des demi-paniers. La deuxième, c’est qu’on a pas mal de turn-over, comme on l’a déjà évoqué. On a une majorité de jeunes actifs, beaucoup de déménagements, beaucoup de jeunes parents qui doivent cumuler de nombreuses contraintes d’organisation… Ce sont les raisons principales pour lesquelles les adhérents quittent l’AMAP. Ce n’est pas une question de qualité des produits, ou de mécontentement du service rendu. Après on a un public de convaincus car les gens savent en général où ils mettent les pieds quand ils s’inscrivent à une AMAP aujourd’hui ! Mais sinon, pour répondre à ta question, les inscriptions se font de juillet à septembre pour rempiler sur une année complète.

S’ils se rendent compte que ce n’est pas leur truc, on rompt l’abonnement, sans encaisser leurs chèques. On n’est pas des sauvages !

Laurent : Après, Chaque AMAP a son mode de fonctionnement. Le nôtre est assez rigide, dans la mesure où on s’inscrit pour une année entière. On n’a pas de souplesse sur les absences durant les vacances, du coup l’amapien doit s’organiser avec ses amis ou autres amapiens pour récupérer un panier. Sur d’autres AMAP il y a peut-être 1 ou 2 jokers sur l’année.

Céline : Oh non tu es dur Laurent ! On est quand même souples ! On est même carrément souples : par exemple, si on a de la place pendant l’année, on accueille des amapiens en cours d’année. On l’a déjà fait !

Laurent : C’est vrai aussi qu’on laisse partir les gens, s’ils se rendent compte au bout de 2-3 paniers que ce n’est pas leur truc, ou que ça ne colle pas. On rompt l’abonnement, sans encaisser leurs chèques. On n’est pas des sauvages !

C’est toujours mieux quand d’autres systèmes de consommation locale émergent. Je pense que l’on est davantage complémentaires que concurrents.

Céline : Ah tu vois ! Donc, on peut aussi laisser partir des gens en cours de route, et en accueillir en cours de route. On est quand même souples ! (Rires)

Depuis quelques années, il y a un engouement autour des produits de saison, locaux et bio. Il y a différents modèles qui ont émergé : la vente directe, les distributions de paniers, la commande internet de type « la ruche qui dit oui » …  Quel est votre regard sur ce phénomène ?

 Laurent : Nous, on est toujours idéalistes… Je dirais que c’est toujours mieux quand d’autres systèmes de consommation locale émergent. Je pense que l’on est davantage complémentaires que concurrents. On ne peut pas dire non plus que cela foisonne la vente directe ! On doit être à environ 7 à 8% de la consommation nationale. Donc on reste relativement en marge. Enfin, si les consommateurs prennent conscience des enjeux, et ont la volonté de changer la donne, c’est tant mieux !

Céline : Je trouve ça super, mais ce qui m’intéresse particulièrement dans le système de l’AMAP, c’est le lien avec le producteur. J’aime savoir d’où viennent, réellement, mes produits. Quand tu vas sur le marché, tu peux au moins discuter avec le producteur, quand c’en est un. C’est pour cela que je trouve intéressantes des initiatives comme « le court-circuit », qui mettent en avant ce lien avec le producteur. C’est ça que je recherche quand je consomme : j’ai besoin de savoir quelle est la provenance, qui est le producteur, l’histoire du produit en fait !

L’AMAP c’est complet : des produits sains, du local, du lien avec le producteur et un rapport qualité prix assez attractif.

Mais attention, il y a aujourd’hui des systèmes de commande en ligne où cela n’est pas du tout le cas ! Un copain me présentait récemment un système de commande en ligne, où tu t’abonnes à une box de livraison. Tu peux commander des légumes en fonction d’une recette, sans avoir une seule information sur la provenance ! Si on regarde bien, des vrais modèles de circuit court intégrant ce lien à la terre, l’information sur la provenance, et le producteur, il n’y en a pas tant que ça en fait !

Je fais en sorte d’avoir des paniers bien garnis. C’est aussi une forme de reconnaissance envers l’engagement des amapiens.

Laurent : Disons qu’aujourd’hui, chaque consommateur a davantage de possibilités pour trouver son intérêt, en fonction de son mode de consommation. Regarde ton copain : peut-être qu’avant il mangeait des surgelés, et là, il est passé aux produits frais, c’est déjà pas mal ! Mais Céline et les adhérents de l’AMAP sont des personnes qui, à la base, sont forcément davantage intéressées par ces questions de provenance et fabrication… Si on se demandait la même chose avec nos chaussures, ça serait plus compliqué ! Remarque, même dans le textile aujourd’hui ça bouge, et tant mieux !

Au final, on peut dire que l’AMAP c’est complet : des produits sains, produits dans le respect de l’environnement, du local, du lien avec le producteur et un rapport qualité prix assez attractif quand même ! Pour ma part, je fais en sorte d’avoir des paniers bien garnis. C’est aussi une forme de reconnaissance envers l’engagement des amapiens. Nos paniers, c’est 8,5€ et 13€. Ça reste honnête et abordable. Si vous allez dans une supérette bio, avec 13€, je ne suis pas sûr que vous reveniez avec un panier aussi bien garni que le mien !

Depuis 25 ans que l’on est installés, je constate que les épisodes météorologiques sont davantage extrêmes, et ont tendance à s’allonger en durée.

On parle beaucoup du changement climatique. Laurent, est-ce que vous pouvez déjà en ressentir les effets sur la production ou les modes de production ? Notamment sur les dernières années avec la chaleur ou le manque d’eau ?

Laurent : Honnêtement, je ne suis pas sûr, à titre individuel, d’avoir suffisamment de recul pour en juger. Cependant, depuis 25 ans que l’on est installés, je constate que les épisodes météorologiques sont davantage extrêmes, et ont tendance à s’allonger en durée. Or, en agriculture, le mauvais temps c’est le temps qui dure… on préfère qu’il fasse beau 15 jours, puis qu’il pleuve 15 jours, alternativement. Ces derniers temps, on peut avoir 1 mois et demi de sécheresse, puis tout d’un coup 1 mois de précipitations. Donc, on constate quand même une évolution, à mon modeste niveau, oui.

Cela peut-il avoir une incidence sur les productions ? Le type de productions ?

Aujourd’hui, le consommateur lambda consomme plus de variétés que mes parents !

Laurent : Bon… On n’en est pas encore à planter de la vigne ! (Rires) Malgré tout, cela fait évoluer les pratiques chez certains collègues. Par exemple, avant ils semaient les carottes au printemps, parce que l’hiver était trop rigoureux. Aujourd’hui, certains essayent de semer à l’automne, en espérant passer l’hiver, en misant sur le fait qu’il ne fasse pas trop froid. Autre exemple : certains commencent à miser sur le soja. C’est le genre de culture que l’on ne pratiquait pas avant. La recherche agronomique permet de développer des variétés plus adaptées à notre région. La patate douce aussi ! On voit aujourd’hui davantage de possibilités.

C’est aussi lié à la demande, on voit que les clients veulent aussi diversifier leur consommation. Dans l’ancien temps, c’était poireaux et patates tout l’hiver ! De nos jours, c’est patate douce et panais. Le consommateur lambda consomme plus de variétés que mes parents ! J’ai déjà eu des réflexions sur la quantité de pommes de terre dans le panier. Les gens n’en mangent plus autant qu’avant.

Et donc, pour illustrer, qu’est-ce que l’on peut trouver en ce moment dans le panier de l’AMAP ?

Laurent : Ah là, on est encore en pleine saison de légumes d’hiver : des pommes de terre, des poireaux, des carottes, des betteraves, des topinambours, ce qu’on appelle des légumes lourds. Je peux aussi mettre du chou mais sous différentes déclinaisons : chou rouge, choux de Bruxelles, chou blanc, chou vert…

Tout le monde n’a pas eu de potager ou des parents agriculteurs : c’est quand même important de faire découvrir comment les légumes poussent, comment on travaille.

Ça fait partie de l’intérêt de l’AMAP, de goûter à plusieurs légumes différents. On essaye d’amener quand même un peu d’originalité dans le panier. On fait aussi en sorte d’apporter les légumes relativement bruts dans le panier, pour que les personnes réalisent à quoi ressemble le légume fraichement cueilli ou produit.

On parlait des adhérents et de leur implication. Je crois avoir qu’il y a des coups de main organisés ici sur l’exploitation. Vous pouvez m’en parler un peu ?

Laurent : C’est dans un souci de transparence avant tout ! On dit que les légumes viennent d’ici, que c’est du local. Au moins, ici, les adhérents peuvent venir vérifier, et on est à leur disposition pour en discuter !

Sur le plan éducatif aussi : tout le monde n’a pas eu de potager ou des parents agriculteurs. Comme on s’adresse à des citadins, c’est quand même important de leur faire découvrir comment les légumes poussent, comment on travaille.

Chez Laurent, Il n’y a pas vraiment de chantiers physiques, on est plutôt sur une démarche de « portes ouvertes » à la ferme !

On organise de temps en temps des chantiers, qui ne sont pas forcément obligatoires, même si c’est inscrit dans la charte d’engagement…. La dernière fois on a fait « prépare ton panier ». On n’a pas fait de livraison, et les gens sont venus chercher leurs légumes sur l’exploitation. Ils viennent récolter leurs produits.

Céline : En fait, dans la charte des AMAPs, il est inscrit le fait d’organiser des évènements pour aider les agriculteurs. Il y a certains agriculteurs qui comptent vraiment sur des coups de mains pour semer ou récolter, notamment dans les très petites exploitations. Chez Laurent, on est davantage dans la pédagogie, dans l’idée de se rencontrer et de transmettre quelque chose. Il n’y a pas vraiment de chantiers physiques. On est plutôt sur une démarche de « portes ouvertes » à la ferme !

Ces moments créent une convivialité forte, les gens viennent avec leurs enfants aussi… On termine toujours avec un barbecue ou une auberge espagnole. Ça créée du rapprochement avec Laurent, mais entre les amapiens également. C’est plutôt chouette !

On travaille beaucoup pour gagner peu, mais c’est noble, car on produit quand même de la nourriture.

C’est quoi les perspectives pour l’AMAP ? Et pour toi Laurent ? Tu nous évoquais un magasin de producteurs… ?

Laurent : Pour moi si cela peut continuer ainsi, avec des gens motivés c’est super ! Si notre magasin fonctionne bien, on pourra envisager de prévoir d’associer un autre producteur ! On pourrait envisager d’installer un jeune, et qu’il prenne la relève pour l’AMAP. C’est quelque chose que j’ai envie de faire perdurer.

Céline : Il faut dire aussi que Laurent est beaucoup dans la transmission. Il a des jeunes en « couveuse » ! Il n’en parle pas assez.

Laurent : En ce moment, on a deux apprentis. On propose aussi souvent aux stagiaires motivés d’être en couveuse : on leur met à disposition 5000m² et de l’outillage pour qu’ils puissent se tester. Cela leur permet de voir s’ils sont faits pour ce métier. Car il faut quand même le dire : c’est spécial … On travaille beaucoup pour gagner peu, mais c’est noble car on produit quand même de la nourriture. La réalité c’est qu’il faut travailler beaucoup. Donc ce n’est pas facile.

Ce système de « couveuse », ça peut permettre à des jeunes de leur éviter d’engager des grosses sommes d’argent, et au bout de deux ans qu’ils réalisent que ce n’est pas ce qu’ils souhaitaient. Au moins, ils sont face à la réalité. On a eu 7 ou 8 couvés déjà. Il y a un réseau qui s’occupe de cela. C’est cadré, vous êtes reconnus au niveau de la MSA, vous bénéficiez du SIRET de l’agriculteur… il y a plein de choses qui existent ! Il faut en parler !

Des amapiens avaient initié des commandes groupées de produits ménagers. On a fait du poulet, on a testé les œufs…

D’ailleurs dans l’AMAP y-a-t-il des produits qui ne viennent pas de Laurent ? J’ai vu une fleuriste lors de la dernière distribution …

Céline : On a une productrice de fleurs qui vient tous les mois, délivrer ses fleurs locales. On a aussi des boulangers, la SCOP des « pains dépaysants » qui livre toutes les semaines à l’AMAP sur le même principe : on paye en avance.

Laurent : C’est du pain dont le blé vient d’un producteur des Flandres !

Céline : On a eu pas mal de forces vives à un moment donné. Il y avait des amapiens qui avaient initié des commandes groupées de produits ménagers. On a fait du poulet, on a testé les œufs… d’une personne qui était en couveuse chez Laurent d’ailleurs.

Laurent : Pour des producteurs c’est parfois navrant que la demande ne soit pas en face : je repense à Axelle, avec qui on faisait du poulet, c’est dommage que cela n’ait pas marché car elle n’en vendait pas suffisamment.

Céline : L’idée c’est bien d’aller vers la diversification. Pourquoi pas en lien avec d’autres associations de La Madeleine d’ailleurs, qui peuvent proposer d’autres produits. Je crois avoir entendu parler du développement d’une association de consommateurs sur du vrac… L’idéal, ça serait que l’on ait un site de distribution commun. Ça serait top !

J’aimerais bien aussi qu’on remette en place un partenariat qu’on avait mis en place avec l’épicerie solidaire de La Madeleine. On parlait tout à l’heure des « pertes » de paniers des gens absents, notamment l’été. Ces paniers étaient donnés à l’épicerie solidaire… S’il y a des liens à faire avec ce type d’associations à La Madeleine on est partants ! On réfléchit aussi à une forme de panier solidaire, accessible à des gens qui ont moins de moyens. Ce n’est pas évident, car ça veut dire que c’est l’AMAP qui prendrait pour partie en charge, mais c’est quelque chose qu’on aimerait bien réussir à développer… même si le prix du panier actuel est juste. Bref, encore plein de belles choses qui nous attendent !

Vous pouvez contacter l’AMAP de La Madeleine via leur facebook

Les distributions se déroulent les mercredis de 18h à 19h30, place du marché.

Vous pouvez également vous rendre au magasin de producteur de Laurent, « la ferme de l’Aubépine », à Bois-Grenier.

Propos recueillis par Romain Bayart / Photos Julien Bonleu